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Le Coeur de deux petites tchadiennes
11 avril 2011

5ème jour : lundi 11 avril

programme  : consultation avec notre médecin généraliste et avec la dentiste. 

Chez notre médecin, nous signalons le fait qu'elle se touche fréquemment l'oreille. Elle a, en effet, une petite inflammation qui, en cas ordinaire, se guérirait toute seule sans médicament, mais (Halimatou) n'est pas une petite fille comme les autres. Il faut éviter, au maximum, tout ce qui pourrait contrarier l'opération à venir. Notre médecin, n'arrive pas à obtenir le cardiologue au bout du fil, pour prendre son avis et il est convenu qu'il nous rappelle dès qu'il a pu le faire. Il nous donne une ordonnance avec tous les médicaments dont nous pouvons avoir besoin et il téléphone à la pharmacie pour que nous n'ayons pas à faire l'avance des frais que doit rembourser la chaîne de l'espoir. Il intervient pour que ce soit la pharmacie qui, d'une certaine façon accepte de faire cette avance en présentant directement la facture à l'association. 

En sortant de chez lui, (Halimatou) souriante lui fait un signe d'au-revoir de la main en ouvrant et en fermant sa paume. Elle le fera toujours par la suite dès qu'elle veut que quelqu'un s'en aille ou quand elle se prépare à partir. 

Au repas de midi, elle accepte enfin de se tenir seule, assise dans la chaise haute qui a soutenu plusieurs générations de fesses enfantines dans la lignée maternelle d'Evelyne. Concombres, carottes rapées, rillettes de poulet, garanties sans autre ajout d'autres viandes, sont au menu. Elle mange de bon appétit en tenant ses deux fourchettes avec la grâce et la distinction d'une demoiselle du "grand monde". Ce qu'elle adore par dessus tout, c'est croquer à belles dents une pomme dont elle demande à Marcel d'enlever la peau. 

L'après-midi, rendez-vous chez la dentiste qui doit vérifier la bonne santé des dents d'une enfant de 3 ans. Encore faut-il qu'elle accepte d'ouvrir la bouche. Deux petits jouets, mis en attente sur le coin d'une table de travail et le tour est joué.

communication entre parents et famille d'accueil 

Se séparer de ses enfants pour plusieurs longues semaines, surtout lorsqu'il sont très jeunes et malades comme l'est cette fillette n'est pas une chose facile. La douleur de la séparation s'ajoute aux appréhensions et aux peurs liées à l'opération qu'elle doit subir. Normalement, dans le contrat moral qui lie les parents à la "chaîne de l'espoir" ils ne connaissent pas l'adresse ni le numéro de téléphone de la famille d'accueil. C'est une précaution, difficile à accepter parfois, mais elle est faite pour prévenir certains "débordements" dus aux craintes liées à cette situation, toujours difficile à vivre pour les parents et pour les enfants. 

C'est la famille d'accueil qui doit prendre contact avec la famille de l'enfant pour donner des nouvelles. C'est ce qui est fait par l'autre famille d'accueil qui achète une carte internationale prépayée avec laquelle tout le monde peut téléphoner, sans utiliser son propre numéro de téléphone, de n'importe quel endroit, en composant codes secrets et numéros d'accès. Les familles des deux enfants ne se connaissent pas, mais elles habitent la même ville. Elles sont ainsi informées, individuellement, qu'elles sont bien arrivés et que tout se passe bien. Les deux familles tchadiennes parlent suffisamment bien le français pour que la communication soit facile. 

Cependant Danièle aura une surprise en téléphonant avec le numéro trouvé dans la valise de l'enfant que nous gardons et que nous croyons être Bibido. Avec celui-ci, elle a de nouveau au bout du fil les mêmes parents. Au téléphone avec elle nous essayons de trouver une explication rationnelle à cela, sans y parvenir réellement. Nos idées toutes faites sur les problèmes qui se passent au Tchad n'y sont sans doute pas étrangères et nous n'insistons pas.   

C'est donc avec surprise que Evelyne, vers 13 heures, reçoit un premier coup de téléphone d'une personne qui se présente comme la cousine paternelle de l'enfant accueilli. Elle vit dans la même région que nous et elle voudrait être là pour le jour de l'opération. Elle semble bien connaître le programme des soins et les dates des rendez-vous qui nous ont été fixées. Comment la famille a-t-elle fait pour avoir notre numéro de téléphone ? Personne, dans les "maillons" de la "chaîne de l'espoir", ne pense avoir communiqué notre numéro et ils ne doivent pas le faire. Outre le secret professionnel médical, au CHU, tout le personnel est tenu, au minimum, à la discrétion personnelle et les coordonnées des hospitalisés ou des tiers ne doivent jamais être communiquées. 

Au cours de l'après-midi, c'est un nouveau coup de téléphone de deux femmes. La première se présente comme "la deuxième maman", l'autre comme la maman. Evelyne donne le téléphone à (Halimatou) qui ne marque aucune surprise et se met à parler en Arabe, d'une belle petite voix, en entretenant une courte conversation avec la maman. Jusqu'ici, avec nous et avec l'interprète, elle ne s'est exprimée que par onomatopées et dans un langage corporel et international, plus ou moins facile à comprendre.

Le soir, elle ne mange que très peu : un petit pain au lait et une pomme. Elle semble pourtant capable de dévorer, à elle seule, toutes les pommes du jardin d'Eden. 

Vers 20 heures, c'est un homme, qui se présente comme le papa de Bibido qui téléphone. Evelyne donne donc des nouvelles car l'enfant dort à ce moment-là. Nous apprenons que cela fait plus d'un an que ce papa a été obligé de quitter sa famille. Il réside actuellement dans un pays étranger où il n'est que 13 heures. Il veut rappeler plus tard car il voudrait entendre au téléphone la voix de la fille et lui parler. Il ne le fera que le lendemain.

Quelques minutes plus tard, alors que nous sommes assis à regarder la télé, c'est une autre personne qui réside en Bretagne qui téléphone à son tour. 

Si nous pouvons comprendre l'inquiétude de la famille, nous nous demandons comment (Halimatou), déjà très perturbée par la séparation et sa maladie va réagir si cette situation devait continuer. Comment pouvons-nous lui expliquer ? Nous ne sommes pas ses parents. Nous ne comprenons ni ne parlons sa langue et nous nous exprimons dans une langue qu'elle ne comprend encore, sans doute, que très peu ?

Quelques minutes plus tard, nouveau coup de téléphone. C'est notre médecin cette fois-ci. Il a eu une communication avec son collègue cardiologue et il vaut mieux prescrire des antibiotiques pour l'oreille. 

C'est la cinquième nuit que la fillette passe chez nous. Jusque là, elle a fait des nuits complètes sans se réveiller. Cette nuit-là, quand nous faisons les comptes, elle s'est réveillée et mise debout pour venir dans notre chambre à 11 h 45, à minuit 30, à 2 h 15, à 4 h 50 et enfin à 6 h 15. La dernière fois, nous acceptons qu'elle vienne finir son sommeil dans notre lit. Pour les autres réveils, Evelyne va dans la chambre pour se coucher, dans le lit près du sien, et elle attend qu'elle se rendorme. 

Ce n'est que plus tard que nous comprendrons mieux ce qui perturbe celle que nous appelons toujours Bibido alors que, en réalité, il s'agit de Halimatou.

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Le Coeur de deux petites tchadiennes
  • Halimatou et Bibido sont 2 tchadiennes de 3 ans venues pour se faire opérer d'une maladie cardiaque. Suivies par la "Chaîne de l'Espoir", elles sont chez 2 familles différentes : Danièle et Patrice - Evelyne et Marcel. Ce sont ces derniers qui font ce blog
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