26ème jour : lundi 2 mai

Chicorée !

Ce matin dès 6 h 30, elle nous réveille tous les deux. Il nous faut nous lever et prendre notre petit-déjeuner. Comme Marcel, elle boit de la chicorée d'une grande marque. Cela fera, sans doute, très plaisir à Jean-Yves le frère d'Evelyne qui travaille dans la seule entreprise française, bien connue de nos grands-mères, qui fabrique ce produit chez les ch'tis, c'est à dire "ben d'che nous zautres.. Ben dam !"

Téléphone 

Il faut répéter que normalement, les parents des enfants accueillis par la Chaine de l'Espoir n'ont pas les coordonnées de la famille d'accueil. Cependant, dans de rares cas, cela peut se produire. C'est notre cas, sans que les personnes de l'association "la Chaîne de l'Espoir" ait compris comment cela a pu se faire. Nous acceptons donc que seulement le papa et la maman nous téléphonent et ce blog a été créé pour informer tous les autres membres de la famille. C'est du moins ce que nous croyons, puisque la suite va révéler la surprise inattendue. 

Il faut aussi remarquer que, au début, ces coups de téléphone perturbaient plus ou moins la fillette. A ce moment-là nous avions nos explications. Comment une enfant de cette âge peut-elle comprendre la séparation nécessaire à cause de sa maladie ? Comment peut-elle comprendre ce qu'elle peut vivre comme un abandon alors qu'elle entend la voix de ses parents au téléphone ? De nombreuses questions qui peuvent ou non se poser et auxquelles personne ne peut donner une réponse unique à la place de l'enfant. Elle n'exprime ses sentiments que par son corps et par ses pleurs. Régulièrement, elle refuse d'écouter papa ou maman au téléphone, surtout quand elle est en train de manger.

Maintenant que l'opération a réussi, ses sentiments s'expriment de façon différente et son attitude évolue lentement. Les pleurs sont moins fréquents. Parfois même, nous pensons qu'elle s'en sert pour obtenir ce qu'elle désire, comme font beaucoup d'enfants de cet âge, et non plus à cause de la douleur provoquée par sa maladie.

Ce matin, au coup de téléphone "du papa", elle joue et elle commence par manifester un peu de réticence. Marcel insiste en expliquant, elle finit par accepter et c'est une conversation d'une dizaine de minutes avec lui, en arabe. Nous remarquons que sa voix est différente quand elle parle l'arabe avec "son papa ou sa maman" ou qu'elle commence à parler le français avec nous. En tout cas, tout le monde est content et elle sourit d'entendre "baba" son papa, pensons-nous. La conversation s'arrête brusquement quand elle se met à pleurer et elle ne veut plus parler. Le papa me dira ensuite qu'il était en train de lui parler de sa grande soeur, Halimata, et de son grand frère. Il est vrai que, depuis l'opération, nous avons, parfois, des moments de tristesse, voire de pleurs, de sa part sans qu'il y ait apparemment de raison. Pense-t-elle alors à sa famille ? C'est ce que nous croyons. Il faut noter deux éléments dans le maintien de la confusion dans laquelle nous sommes. Bibido a une grande soeur qui s'appelle Halimata, ce qui est la terminaison pour un prénom tchadien. Halimatou est une terminaison d'origine camerounaise, ce qui est l'origine du papa de l'autre enfant. Ces renseignements c'est le papa Ibéda S qui l'append à Marcel. Dans l'autre famille d'accueil, lorsque l'enfant a vu Halimatou en photo elle s'est montrée et a dit "Halimatou". Se désignait-elle alors ou désignait-elle sa grande soeur qui pourrait lui ressembler ?.      

Petit détail qui montre que le monde est petit. Alors qu'il est 1 h du matin à l'endroit où le papa se trouve, c'est lui qui apprend à Marcel la mort de Ben Laden "Pour tout le monde c'est un jour d'espoir et c'est jour de fête en Amérique" dit-il.